13 juillet 2012

Un trader ne meurt jamais, Marc Fiorentino

« Toujours la même chanson pour me réveiller. « Ventura Highway « , d'America. Je ne sais pas si je l'aime parce qu'elle porte mon nom ou pour le thème de guitare. Cela fait huit ans que le CD est dans mon réveil. Il a dû s'incruster. ». C'est en ce matin du 24 Mars 2008 que Sam Ventura prend une grande décision. Il va reprendre le trading. Refaire fortune. « Pas d'objectif fixé, mais une somme qui ne laisse aucune place à la discussion, un massif « Ouah ! Mais c'est une fortune ! ». En spéculant sur les marchés. C'est tout ce qu'il sait faire. Et une idée : « Si je tombe, je ne me relèverai plus. Si je réussis, je recommencerai à vivre ». Sa spécialisation, les bulles. Sa faiblesse, le timing. Rien ne sert de courir, il faut partir à point. Deux fois, il est parti à point. Et il a gagné. Beaucoup. Deux autres fois, il a couru. Et il a tout perdu. La dernière fois, c'était en 1999. Depuis, il n'a plus spéculé. Depuis huit ans. « Huit ans sans la moindre dose ». Empruntant à une amie de jeunesse, il va se relancer dans la course. La course à la fortune, la course contre le temps.

L'histoire commence avec cette décision, et le lecteur suit le personnage évoluer à travers son journal intime. Beaucoup de réflexions, pas mal de références, et un peu de chiffres. A travers ce livre, plus que de faire une description du trading, Marc Fiorentino nous découvre un homme lunatique, dépressif, mais qui a un espoir. Un esprit critique, humour plutôt noir, mais assez réaliste sur la société française et l'esprit humain. Il apporte une analyse de la crise des subprimes, et des conclusions (« heureusement que l'extrême-gauche et les syndicats n'y comprennent rien. Si ils savaient réellement ce qui se passe, ils auraient de quoi faire un Mai 68, quarante ans après, en plus violent. »). Il étudie la situation macroéconomique pour choisir ses cibles : « en gros, on se demande où va le monde ». Au fond, c'est simple : « Les États-Unis vont se transformer. Pour vingt ans. La Chine va s'écrouler. Pour dix ans. Allemagne va à nouveau dominer l'Europe pour vingt ans. L’Angleterre va sombrer à nouveau dans la bière pour dix ans. La France va dormir pour dix ans. Ça, c'est peut-être la seule chose qui ne change pas. ».Dans ce journal, il diffuse petit à petit son avis sur une multitude de sujets : des journaux (« J'ai acheté tous les journaux. Sur la couverture, une grande photo du couple Bruni-Sarkozy en visite chez la reine d'Angleterre. Le monde entier part en sucette, et tout ce qui intéresse les gens c'est l'ourlet de Carla Bruni. ») aux français (« Allons enfants de la paresse, le jour du loir est arrivé. ») en passant par les vins hors de prix qui sont « plus excitants que Clara Morgane en pleine action ».

Ce roman peut se lire de deux manières : soit en oubliant la partie finance, spéculation et économie, et en gardant simplement la description des états d'esprit du personnage, ou bien en se plongeant totalement dedans. Mais l'auteur, compatissant des non-initiés, apporte un point de pédagogie, ou une petite précision à la plupart des termes techniques, afin que le lecteur ne soit pas perdu à essayer de comprendre les contrats à termes ou les bulles immobilières. L'histoire se partage entre Eva, son ancienne associée qui le tourmente, sa volonté de faire fortune, une bulle sur le pétrole qui le détruit peu à peu, autant financièrement que psychologiquement, et une question qui revient souvent : « 21 Juin ou 21 Décembre ? » Un livre qui se lit facilement, on se laisse emporter par cet «ex-winner néo-loser ». Un livre à lire pour les vacances, de préférence assis dans le métro. 


Silvio


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